Donc premier matin, il vente fort, le ciel est bas et gris, il pleut on et off, le genre de matin qu'on sort en 9-10 si on veut vraiment aller faire du kite, parce qu'il faut vraiment vouloir faire du kite pour sortir dans cette température. Parcours classique habituel des courses de kite, au vent - sous le vent avec une porte juste devant le bateau comité.
Je sors en 13, le genre de kite que l'on prend pour les courses dans ce gros vent. L'anémomètre indiquait un vent moyen de 17 noeuds +/- 6. Jamais je ne prendrais cette grosseur de kite pour une balade mais pour la course, on trimme pis on y va. Il ne faut pas oublier que les courses, c'est du pur upwind et du pur downwind. Il n'y a pas de bord de travers. Avec des cordes plus courtes (14,5m dans mon cas), on peut se permettre de sortir plus gros et ça demeure confortable. Quand on montre au près, si ça tire trop fort, on trimme plus ou bien on force la note pour remonter encore plus le vent. En downwind, si ça va trop vite, on descend encore plus le vent. Au fait, en downwind, on doit toujours être au point de décrochage du kite pour être efficace.
Quelque part, il faut vraiment vouloir faire du kite pour sortir dans ces conditions avec cette grosseur de kite. J'ai toujours dit que faire des courses permet de repousser les limites, d'aller plus loin, de devenir un meilleur kitesurfeur, d'être capable d'affronter des conditions plus difficiles. Je lisais récemment un livre de voile où il était écrit ce que je crois être une grande vérité, qui s'applique très bien au monde du kite:
Le rapport entre la course et la croisière est le même dans le bateau que dans d'autres sports. Ce que l'on découvre ou met au point à un haut niveau finit toujours par servir à ceux qui se promènent. En effet, que vous soyez à bord d'un bateau de course ou d'un paisible croiseur, si le vent souffle à 45 noeuds et que vous êtes au vent d'obstacles dangereux, les deux se retrouvent dans la même situation. Les deux équipages devront faire preuve des mêmes capacités. Le coureur aura sans doute, parce qu'il navigue plus souvent et dans des conditions plus difficiles, une expérience dont nous aurions tort de ne pas profiter
Première course, au deuxième tour, je suis tribord amure (donc prioritaire) droit sur la bouée au vent que je n'aurai aucune difficulté à atteindre. Un concurrent sous mon vent un peu en avant de moi sur la même amure décide de tourner car il ne sera pas en mesure d'atteindre la bouée. Impossible pour moi de l'éviter, nos cordes se croisent, nos kites tombent à l'eau. Il se confond en excuse, sachant qu'il n'avait pas priorité. Il réussit à décoller mais avec quelques brides de cassées. Il est rentré directement sans terminer sa course pour changer de kite. Mon kite était mal placé, des brides s'étaient logées derrière le kite. Tout semble intact. À force de gosser et zigonner ce qui m'a paru être 10-15 minutes, j'ai réussi à redécoller mon kite et à replacer les brides sans assistance et sans que j'aie à nager jusqu'au kite. J'ai pris la peine de terminer la course ... que je n'ai pas terminé dernier. J'ai tout de même demandé réparation (correction du classement) pour me faire accorder la moyenne de la journée plutôt qu'une avant-dernière position.
Les 5 autres courses se sont bien déroulées, sans accrochage. Les conditions n'étaient pas des plus faciles, avec une houle de 2-3 pi. Imaginez descendre le vent à fond la caisse en foil et devoir négocier la houle, la hauteur du mat dans l'eau, les concurrents, les algues. That grows hair on your chest comme on dit en anglais. Mais c'est comme ça que l'on prend du galon et que, en balade au large, lorsqu'un coup de vent soudain et inattendu passe, on est capable de passer au travers sans se la casser.
J'ai été surpris de la 5e position à la fin de la journée de vendredi. J'étais vraiment sur l'impression que j'avais moins bien fait.
Samedi, belle journée ensoleillée, mais avec le vent N-NE, impossible de décoller de Kingston. Nous sommes allés à un chalet privé sur Wolfe Island. Décollage et atterrissage un à la fois. Nous voulions tous faire les courses, belle entraide, tout le monde a été très discipliné. Il ne fallait juste pas se tromper de kite. Nous avons enfilé 6 courses dans un vent gusty 12-20 kt et une houle de 1 pi, nous étions presque tous en 15. Tous les coureurs s'accordaient pour dire que le plan d'eau était parfait. En downwind, j'ai fait des pointes à plus de 50 km/h (27-28 kt). Au classement, j'ai fait un peu moins bien, j'ai perdu une place.
Le dimanche, vent E 6-8 noeuds. Waterstart en kiteloop obligatoire pour foiler. Des fois plus d'un kiteloop était nécessaire pour atteindre la vitesse pour foiler. Une fois le parcours en place et les coureurs sur l'eau, un départ de course a été lancé. Nous sommes seulement 4 à avoir franchi la ligne de départ. J'ai manqué mon premier virement. Impossible de repartir en foil. J'aurais dû empanner (gyber) plutôt que de virer (tacker). Empanner est moins efficace mais plus sûr en vent marginal. Les deux tops, un en Flysurfer Sonic VMG 18, l'autre en Sonic Race 21, ont fait un tour et la course a été annulée. L'autre qui a réussi à passer la ligne de départ environ 2 min après le signal a manqué son premier virement de bord et son kite a fini dans l'eau. Nous avons tous eu droit à un rescue de l'équipe de support, sauf celui en 21m qui est revenu en foilant. Classement final pour moi, une satisfaisante 6e position.
https://www.dropbox.com/s/wevdp07pklwwnxk/Results%20Day%202.pdf?dl=0
Quelques observations:
1. J'ai été surpris par la vitesse de Will Cyr (le gagnant) avec des Flysurfer Sonic Race VMG et un foil Mikes Lab. Au près, il me distançait rapidement. Les foils Mikes Lab sont considérés les meilleurs et Will est dans les 10 premiers au monde. Y torche le jeune. Les deux meilleurs, Nicolas Parlier et Johnny Heineken sont aussi sur des Mikes Lab. À les regarder, il n'y a rien de particulier dans ces foils. Ils se ressemblent tous. Ils ont juste ce petit quelque chose de plus, comme une très grande stabilité à très haute vitesse.
2. C'est fou comme le niveau augmente. Rien à voir avec le niveau d'il y a deux ans et significativement meilleur que l'an dernier.
3. Encore cet été, j'ai trouvé difficile de pratiquer en me mettant dans l'état d'esprit course. Quand il vente 25 noeuds, je trouve difficile de cranter et descendre le vent à toute vitesse. Surtout que plus l'été avance, plus il y a des algues, c'est pas le fun de se planter à 50 km/h.
4. L'an dernier, je me réjouissais d'avoir réussi à réaliser les virements et empannages aériens (foiling tacks and foiling gybes) en course. Je constate une très bonne progression car je n'ai manqué qu'un seul empannage et qu'un seul virement en 12 courses. Petite victoire et grande satisfaction personnelle.
5. Comme toujours, la concentration requise pour bien gérer les départs de course fait en sorte que j'oublie de démarrer l'enregistrement des parcours avec ma montre GPS.
6. Les courses duraient en moyenne 10 minutes pour moi et environ 8 minutes pour les meneurs. Ce que je constate est que les meneurs arrivent ou viennent de passer la bouée au vent lorsque j'effectue mon dernier virage pour atteindre cette même bouée. Je trouve encourageant qu'ils ne soient pas si loin en avant, mais c'est tout de même 2 minutes pour une course qui dure 10 minutes pour moi. La marche est haute.
7. Anecdote de course: le vendredi, j'ai constaté que j'arrivais toujours 4-5 secondes trop tôt à la ligne de départ. Je partais pourtant toujours ma montre au premier signal à 5 minutes pile. J'ai pris la peine de vérifier plus attentivement la course suivante et effectivement, il y avait un décalage entre ma montre et les signaux de départ (à 4 minutes, 1 minute et 0 minute du départ), décalage qui augmentait d'une seconde par minute. Avec délicatesse, je suis allé voir le directeur de course pour lui en faire part. Il m'a répondu qu'il entendait les montres des coureurs donner le signal du départ avant le sien mais il ne comprenait pas pourquoi. En plus, il y a eu plusieurs faux départs. Ils utilisaient un chrono de téléphone cellulaire. Il a changé de chrono et tout est rentré dans l'ordre. Comme quoi ce qui peut sembler être un petit détail peut devenir grandement embarrassant pour les coureurs.
What's next dans mon apprentissage? Cet été, j'ai beaucoup travaillé la fluidité des transitions et le travail avec les footstraps. Il me reste encore du chemin à faire de ce côté. La grosse difficulté est de remettre le pied arrière dans le footstrap immédiatement après un changement de pied, autant lors de l'empannage que du virement. Je dois aussi travailler à la stabilité de l'empannage à haute vitesse. Je me garde une petite gêne d'empanner à 50 km/h. Actuellement je ralentis trop à mon goût, j'ai juste pas le guts de ne pas ralentir. Pour vous donner une idée, je suis à l'aise à faire des empannages lorsque ma vitesse est autour de 40 km/h. Je sais que ce n'est quand même pas exactement lent, mais il y a une belle amélioration à y faire.
Sincèrement,
Normand
